Wethen, le 7 août 2019 –
Church and Peace (Eglise et Paix) appelle les églises et communautés chrétiennes en Europe à :
- Inviter le gouvernement de leur pays à adhérer au traité de droit international interdisant les armes atomiques (TPNW).
- Fortifier les personnes et renforcer les initiatives prises dans les églises, la société civile et la politique en faveur de la paix et du désarmement, par leur prière, leur parole prononcée en public et leur collaboration.
- Soutenir les personnes de bonne volonté de toutes religions et dénominations qui pour des raisons humanitaires, se mobilisent en faveur du désarmement mondial de toutes les armes atomiques, pour exemple : la campagne internationale pour l’abolition des armes atomiques (ICAN) qui a été récompensée par le prix Nobel de la paix en 2017 ; les maires pour la paix ; l’organisation médicale IPPNW ou la Croix rouge.
- Aider les victimes de la guerre des Balkans, malades de par leur exposition à l’uranium radioactif des munitions et soutenir les informations nécessaires à ce sujet.
- Demander à votre gouvernement national d’œuvrer (au sein de l’Union européenne) en faveur d’un nouvel accord multilatéral impliquant les Etats-Unis et la Russie pour interdire le déploiement de missiles à courte et moyenne portée en Europe.
Contexte :
« Church and Peace », réseau européen, oecuménique des églises pour la paix a été fondée peu après la fin de la 2e guerre mondiale. Depuis 70 ans les églises, les assemblées, les communautés et les services pour la paix affiliés à « Church and Peace » s’engagent à la suite de Jésus pour la réconciliation et la paix, la non-violence et la justice.
Dans le cadre de la conférence internationale du jubilé des 70 ans de Church and Peace, les délégués ont débattu de l’évolution actuelle allant vers une extension militaire en Europe et une menace nucléaire. Certains membres sont particulièrement touchés ; témoins oculaires, ils rendent compte des conséquences directes (effets visibles) jusqu’à ce jour, de l’usage de munitions enrichies à l’uranium radioactif dans les régions de l’ex-Yougoslavie. D’autres membres de Church and Peace sont en contact avec des survivants des largages de bombes atomiques sur Hiroshima et Nagasaki ou des essais d’armes atomiques des décennies passées.
Nous sommes très préoccupés par les dangers encourus en Europe de par les armes atomiques et les munitions radioactives.
Une petite minorité d’états dans le monde dispose de son pouvoir sur près de 15000 armes nucléaires. Chacune, à elle seule, dépasse la puissance explosive des bombes atomiques qui ont pris feu au-dessus de Hiroshima et Nagasaki. Actuellement, on les modernise techniquement et on réduit la taille des ogives nucléaires, ce qui signifie que leur utilisation sera fort probable. Cela correspond à une situation politique mondiale marquée par de nouvelles crises et tensions , également au sein des 9 états détenteurs d’armes nucléaires.
A maints égards, les pays européens et leurs populations, sont touchés par les dangers actuels et empêtrés dans la situation :
• L’important traité INF pour la sécurité en Europe dans lequel les Etats-Unis et l’ex-Union Soviétique avaient convenu de l’interdiction et du démantèlement intégral de leurs missiles nucléaires de courte ou moyenne portée, a été résilié en premier par les Etats-Unis, puis par la Russie en raison d’accusations réciproques de violation du traité.
• Tous les 9 états détenteurs d’armes nucléaires sont en train d’améliorer techniquement leur arsenal d’armes nucléaires et les systèmes de portage (les avions, par exemple). Le ciblage plus précis donne la fatale impression qu’un usage limité à échelon régional des armes atomiques, soit possible . Ce qui fait baisser le seuil d’inhibition politique quant à une guerre nucléaire.
• Les sites d’hébergement des armes atomiques en Europe seront – comme durant la guerre froide – des lieux-cibles potentiels en temps de guerre ou lors d’attentats, mais seront aussi particulièrement menacés par des accidents.
• Des habitants de Bosnie, de Serbie et du Kosovo signalent de nombreux cas de maladie au sein de la population, également parmi les enfants, en raison de la radioactivité des munitions à l’uranium utilisées par les unités de l’OTAN au fil des guerres. Cette dernière est toujours encore présente dans certaines régions du pays.
• Des églises d’Afrique, d’Amérique Latine et d’Amérique du Nord témoignent qu’il en va , dans les nombreux conflits armés, de l’exploitation de l’uranium et de terres rares , nécessaires à la fabrication de la technologie nucléaire.
• Des banques européennes sont impliquées dans le cofinancement des armes nucléaires. Ce ne sont que de tels investissements qui permettent de produire le renouvellement de l’arsenal des armes atomiques.
• La modernisation des ogives nucléaires et de leur système de portage mobilisent d’énormes ressources financières en provenance des puissances nucléaires et autres états, qui seraient grandement nécessaires en Europe pour lutter contre la pauvreté, la faim et la violence, ainsi que pour financer l’éducation et la protection du climat.
Nous sommes effrayés pour ce qui est des dommages irréversibles causés par une guerre nucléaire.
Des recherches quant aux effets d’une éventuelle guerre utilisant des armes nucléaires, concluent que les conséquences pour la vie humaine, la nature et le climat, déclencheraient des catastrophes d’une ampleur incontrôlable. Aucune organisation de secours ne serait en état de protéger la vie humaine du rayonnement radioactif et des retombées. Les vivants et les générations suivantes seraient extrêmement affectés par des maladies graves et par la contamination de l’atmosphère.
Même dans le cadre d’une guerre atomique prenant en compte la réduction des ogives nucléaires et limitée à l’échelon régional, le nombre de victimes de la population civile serait extrêmement élevé et les conséquences climatiques pour la production de denrées alimentaires précipiteraient des milliards d’humains dans la famine.
L’esprit de Jésus-Christ nous appelle à la paix – Les églises contre les armes atomiques.
Nous croyons que Jésus-Christ nous a appelés à être messagères et messagers de la réconciliation (2 Co 5. 20). La mission du réseau mondial des églises est de s’engager à vaincre l’injustice, la pauvreté et la guerre, à promouvoir une coexistence pacifique et une sécurité commune pour tous les humains.
La menace concernant l’élimination de centaines de milliers de personnes et la contamination radioactive de tous les continents est en contradiction totale avec le témoignage biblique dont nous, humains ayant foi en Jésus-Christ, sommes porteurs.
Avec la doctrine de la dissuasion nucléaire, il en va d’aucune manière, de formes de violence d’état de droit ou de défense nationale telles que légitimement reconnues par l’éthique de la plupart des églises mais il s’agit d’une menace extrêmement inhumaine et contraire aux droits de l’homme avec l’élimination de centaines de milliers et davantage de personnes.
Dans ce sens, des synodes et des directions ecclésiales de nombreuses églises ont expliqué au cours des années passées leur opposition fondée sur leur foi en Jésus-Christ, à la légitimation éthique d’une menace faisant usage ou non d’ armes nucléaires , par exemple : la United Church of Christ (USA), les églises de Suède et de Norvège, la United Reformed Church d’Afrique du Sud, l’église Presbytérienne, la United Methodist Church, le National Council of Churches en Corée, le National Council of Churches au Japon, le Conseil de la Fédération Réformée en Allemagne et l’assemblée annuelle de la Société Religieuse des Amis ou Quakers en Allemagne.
Après dix ans de mobilisation permanente de la campagne internationale pour l’abolition des armes nucléaires « International Campaign for the Abolition of Nuclear Weapons » (ICAN) soutenue par de nombreuses organisations de la société civile, tels la Croix Rouge Internationale, le Conseil Oecuménique des Eglises et le Vatican, les Nations Unies ont voté le 7 juillet 2017 la Convention des armes nucléaires, traité de prohibition des armes atomiques (Treaty of the Prohibition of Nuclear Weapons, TPNW). 122 des états réunis aux Nations Unies l’ont approuvé parmi lesquels 70 l’ont signé entre temps.
L’accord comble une lacune du droit international. Il interdit la fabrication, les tests, la production, les transferts, le stockage et la menace d’emploi des armes atomiques. Ainsi les états détenant encore des armes atomiques seront délégitimés sur le plan éthique par la majorité des états.
Ce traité historique nécessite le maintien du soutien public et inconditionnel de l’oecuménisme mondial et si possible de nombreuses églises et dénominations.
C’est pourquoi Church and Peace s’adresse aux synodes et aux directions ecclésiales en Europe et les prie de s’adresser respectivement à leur propre gouvernement afin de promouvoir résolument le traité d’interdiction des armes atomiques.
Quelques exemples illustrant le soutien des églises chrétiennes au traité d’interdiction des armes atomiques :
Depuis la fondation du Conseil Oecuménique des Eglises (COE), chaque assemblée demande le désarmement de tous les systèmes d’armes atomiques, biologiques et chimiques. Le COE a largement soutenu les différentes initiatives de politique de désarmement émanant de sociétés civiles, d’organisations internationales et de groupes d’experts, ayant conduit aux traités internationaux d’interdiction des armes biologiques en 1972, des armes chimiques en1993, des mines anti-personnel en 1997, et au traité des Nations-Unies interdisant les armes nucléaires en 2017. Lors de sa dernière assemblée plénière en 2013, les représentants du COE ont confirmé les exigences formulées dans plusieurs assemblées antérieures sur une base éthique et théologique , de proscrire la fabrication, la possession et l’utilisation d’armes atomiques considérées comme « crime contre l’humanité ».
Le Pape François a soutenu de multiples manières l’aboutissement du traité d’interdiction des armes atomiques des Nations Unies (TPNW). Le Vatican a fait partie des premiers signataires. Au mois de novembre 2017, le pape s’est exprimé pour vaincre la doctrine de la dissuasion nucléaire : « Lorsque nous pensons aux catastrophiques conséquences humanitaires , aux répercussions sur l’environnement causées par chaque utilisation de l’arme nucléaire, nous ne pouvons pas nous dédouaner du ressenti d’une vive inquiétude. Par conséquent, eu égard au danger d’une explosion accidentelle de telles armes, quelle qu’en soit l’erreur déclencheuse, condamnons de manière ferme, la menace de leur utilisation ainsi que de leur détention, cette dernière étant au centre d’une logique de peur qui concerne non seulement les parties du conflit mais l’humanité entière . »
L’assemblée plénière de la Conférence des Eglises Européennes de Novi Sad en 2018 , a demandé à ce que « les voix s’élèvent contre toute recherche et toute production d’armes atomiques. »
Le 13 juillet 2018, dans une prise de position (Nuclear ban motion), le Synode général de l’Église d’Angleterre a approuvé explicitement le traité d’interdiction des armes atomiques des NU et l’exigence d’un désarmement nucléaire total, elle a réitéré l’appel à son gouvernement.
L’Église protestante en Rhénanie, Allemagne , a adopté la « Parole de Paix 2018 » . Concernant les armes nucléaires , nous lisons: « Nous confessons que la menace d’armes de destruction massive , atomiques, mais aussi chimiques et biologiques, ne peut plus être considérée comme un moyen légitime d’auto-défense. Nous appuyant sur la Paix de Dieu, nous ne voulons plus être entourés, protégés et mis en danger par de telles armes. »
Le retrait des armes nucléaires est exigé à Büchel dans l’Eifel (Allemagne) ainsi que dans toute l’Europe. Le gouvernement fédéral est invité à signer le traité d’interdiction d’armes atomiques.